Le Problème à trois corps de Liu Cixin

Qu’un roman chinois soit un succès planétaire mérite qu’on y prête attention. 

Après avoir été publié par épisodes par le magazine Chinois  Kehuan shijie ,publié à partir de la ville de Chengdu, le Problème à trois corps (plus sobrement San ti / 三体 en Chinois), est devenu un fois publié en roman papier et digital, l’un des romans de science fictions les plus populaires en Chine. 

Il obtient en Chine le prix de littérature de science-fiction Galaxy Award, puis le prix Hugo du meilleur roman aux Etats-Unis, le prix Kurd-Laßwitz en Allemagne et le prix Ignotus en Espagne. 

Ce succès d’édition est relayé par son adaptation en série télévisée par Tencent Movie en Chine, puis par Netflix.

Littérature de genre donc, de science-fiction, mais avec un appel remarquable, formant une épopée interstellaire, faisant levier sur l’aspiration puissante et la crainte à la fois, de la rencontre d’une autre espèce intelligente dans l’univers.

Le roman forme un récit planétaire, puisque les Amériques et l’Europe, l’Asie orientale et l’Australie, sont toutes mobilisée dans cette guerre avancée et distante à la fois, avec un ennemi extraterrestre dont la flotte est supposée faire route et menacer l’espèce humaine, mais n’arrivera que 400 ans plus tard dans le système solaire.

Pendant cette attente, tous les fantasmes et toutes les réalités se déchaînent, la civilisation extraterrestre avancée étant tenue comme des presque dieux rédempteurs par certains, comme l’outil de la destruction d’une race humaine mauvaise par d’autres, ou encore comme la menace mortelle qui justifie que, sous l’égide de l’ONU, les plus puissants moyens soient mis-en-commun pour lutter contre elle.

Ample œuvre d’imagination mais aussi de vulgarisation et de projection scientifique à la fois, détaillant des recherches en physique fondamentale, des laboratoires de recherche appliquée à la fabrication de nouveaux nanomatériaux, l’astrophysique et d’autres.

Les scientifiques les plus brillants de la terre y sont poussés au suicide, tandis que d’autre sont recrutés au sein de projets de lutte contre cet ennemi aux capacités terrifiantes, lui-même cependant terrifié tant par la capacité humaine au mensonge que par l’accélération de ses progrès scientifiques, qu’ils visent à rendre impossible.

 Une autre particularité en est que, en sus d’être un roman futuriste, c’est aussi un roman qui raconte les plus durs moments de l’histoire de la Chine contemporaine. Les jeunes Gardes Rouges de la révolution culturelle y sont mobilisés, mais aussi l’enrôlement forcé des anciens gardes rouges comme des plus brillants scientifiques dans la rééducation par le travail. 

Ici, l’un des personnages clefs du roman, fille de scientifique dont le père à été assassiné publiquement en un lynchage public pendant son enfance, se retrouve quoiqu’étant un des esprits les plus brillant de sa génération, travailler de façon harassante dans le déboisement de la Mongolie Intérieure, avant d’être récupérée pour ses connaissance par une base secrète à l’écoute de l’espace.

Est-ce le résultat de la critique des périodes les plus dures de la répression communiste, ou d’avoir permis que les droits d’adaptation en série télévisuelle de ce roman soient cédés à Netflix pour réaliser une seconde série plus au goût, et peut-être aux valeurs, d’un public occidental ?  Vient d’être mis en examen, ce mois-ci, Yao Haijun, l’éditeur qui avait découvert et publié le premier en Chine cette trilogie ?

Nul ne peut le savoir et peut-être n’est-ce ni l’un ni l’autre. Mais le succès planétaire de ce livre fait que même l’ouverture d’une enquête à l’autre bout du monde, prend aujourd’hui une signification différente pour le monde littéraire qui en Chine se débat encore souvent avec la censure.

Le Problème à trois corps à été publié en France par Actes Sud dans une traduction de Gwennaël Gaffric.